La Conférence Environnementale du 14 et 15 septembre 2012 a montré l’importance accordée par le Président de la République et le gouvernement français aux enjeux environnementaux : changement climatique, épuisement des ressources et menaces sur la biodiversité. La feuille de route établie à l’issue de la conférence pose les bases de la transition énergétique, fondée sur la sobriété énergétique, le déploiement des énergies renouvelables, et plus généralement la transition environnementale.

Ce rapport, commandé par la Caisse des Dépôts, met en lumière l’importance des formes urbaines pour la transition énergétique dans les territoires urbains français et européens. Le rapport présente en détail l’impact des formes urbaines sur la consommation énergétique et l’environnement, et démontre l’importance fondamentale de la planification urbaine et énergétique comme levier pour la transition énergétique. Trois documents issus de ces travaux sont disponibles au téléchargement sur ce site :

La présentation du séminaire  du 10 février 2014 à la Caisse des Dépôts est également disponible au téléchargement.

 

CDC

Spécificités des territoires urbains et implications pour la transition énergétique

 Les villes sont les lieux où se crée la richesse et où se consomme l’énergie

Les villes sont le lieu de la création de richesse et de l’innovation  car elles attirent les talents et multiplient le nombre d’interactions et d’échanges possibles. La ville est avant tout la manifestation physique d’un réseau social intense et complexe. C’est la multiplication et la diversification des interactions au sein de ce réseau social qui est à l’origine des effets d’agglomération et qui, in fine, contribue à la création de richesse et à l’innovation.

Les villes consomment 80% de l’énergie. Les émissions directes associées aux villes ont représenté entre 75 et 80 % des émissions globales de CO2 entre 1990 et 2008. Les villes consomment certes davantage d’énergie en valeur absolue, mais elles créent en retour relativement beaucoup plus de valeur et de richesses avec la même quantité d’énergie. Elles ont une plus grande productivité des ressources et de l’énergie car elles sont les premières à intégrer l’innovation au travers des économies d’échelle, des économies d’agglomération et des économies de gamme. Si les villes sont historiquement au cœur de la dynamique de création de valeur et de richesse, c’est en raison notamment de la plus grande productivité des ressources et de l’énergie.

Les villes au sein du système urbain

Les villes ne sont pas isolées. Elles s’insèrent dans de multiples réseaux, et sont mutuellement interdépendantes, au sein d’un système stable qui reflète un optimum économique : un nombre réduit de grandes villes qui concentrent la création de richesse et l’innovation, et une longue traîne de moyennes et petites villes. La distribution des tailles de villes (distribution de Zipf-Pareto) reflète un optimum économique. Des villes de tailles différentes sont en effet complémentaires au sein du système urbain. Pour la croissance et la compétitivité économique, c’est l’organisation du système urbain en différents sous systèmes bien structurés qui est importante et non les seuls effets d’agglomération des grandes métropoles.

 Parce qu’elles ne bénéficient pas naturellement des économies d’échelle et des effets d’agglomération, les petites villes n’ont pas le même « comportement énergétique » que les grandes villes. Lorsqu’elles croissent, les villes moyennes et petites ont une élasticité énergétique jusqu’à 12 fois plus grande que les grandes villes. Leur consommation énergétique a donc tendance à augmenter beaucoup plus vite qu’elles ne grandissent. Pour la transition énergétique, les villes moyennes et petites appellent donc une attention particulière et des stratégies différenciées en fonction de leur taille (Proposition 11.3).

Dans l’évolution des systèmes urbains, les grandes villes captent, par leur diversité et leur complexité, l’innovation et la nouveauté, et relaient aux villes moyennes et petites les activités et les technologies matures. La diffusion de l’innovation des grandes vers les petites villes ne se fait pas à vitesse constante ni égale, mais dépend des capacités d’adaptation de chaque système urbain. Pour réussir la transition énergétique, ce transfert de l’innovation vers les villes moyennes et petites doit être encouragé par les pouvoirs publics (Proposition 11.4).

Les villes sont des systèmes complexes : Optimiser le système plutôt qu’optimiser les composants individuels

La ville est un système complexe. En tant que telle, elle présente (1) une efficience structurelle et (2) de nombreux effets de seuil, de saturation et de rétroaction positive ou négative. Deux stratégies complémentaires permettent donc d’optimiser les territoires pour la transition énergétique : (1) Améliorer l’efficience structurelle des territoires en agissant sur leur organisation spatiale (Propositions 1.1 à 2.3) et (2) Déployer des approches sectorielles (transport, bâtiment, énergie) intégrées (Propositions 3.1 à 10.3).

Les villes présentent une forte inertie en raison de la durée de vie des infrastructures et des bâtiments dont certaines dépassent le demi-siècle voire le siècle. Les choix d’infrastructures urbaines du XXe siècle (bâtiments, systèmes de transport, centrales électriques, usines, etc.) ont orienté nos villes dans des chemins de dépendance à l’égard des énergies fossiles. Les stratégies qui améliorent l’efficience énergétique structurelle des territoires grâce à des investissements structurants et une planification spatiale plus rationnelle des villes, ancreront la dynamique de transition énergétique dans le long terme.

Du fait des effets de seuil, de saturation et des nombreuses rétroactions, la réduction globale des consommations énergétiques n’est pas forcément égale à la somme des réductions sectorielles. Si les stratégies sectorielles sont intégrées, cohérentes et concertées, la réduction peut être bien supérieure à la somme des réductions sectorielles. En l’absence d’intégration des actions sectorielles, la réduction globale peut être nulle, en raison des nombreux impacts croisés et des effets rebonds. L’intégration des actions aux différentes échelles (nationale, régionale, locale et individuelle) est donc essentielle (Proposition 11.2).

Agir en priorité sur la demande

 La réduction de la demande est le levier le plus puissant

C’est en premier lieu sur la génération de la demande qu’il faut agir car les actions sur la demande ont à la fois le plus d’impact et représentent des effets de levier beaucoup plus importants que les actions sur l’offre. Les processus de conversion et de distribution de l’énergie sont responsables d’importantes pertes entre l’énergie primaire et l’énergie finale consommée. L’estimation moyenne généralement admise est de 3kWh d’énergie primaire pour 1kWh d’énergie finale consommée. Pour la transition énergétique, les stratégies de réduction de la demande disposent donc d’un effet de levier conséquent, avec un facteur 3 (Propositions 1.1 à 7.4).

Leviers politiques pour la transition énergétique (Source : Global Energy Assessment, cité dans le rapport du GIEC à paraître)

Au sein des actions sur la demande, ce sont celles qui portent sur l’échelle la plus grande et la plus intégratrice, c’est-à-dire l’aménagement spatial et économique  des territoires, qui ont l’effet de levier le plus important, comme le montre le graphique précédent. Les autres moteurs des consommations d’énergie urbaine et les leviers d’action politique sont dans l’ordre : la consommation, l’efficience dans la demande finale, la forme urbaine et les infrastructures (c’est-à- dire les infrastructures de fourniture de l’énergie, les réseaux de transport, la densité, la mixité des usages du foncier). Le choix des modes de transport et la conception des bâtiments viennent seulement ensuite, suivis en dernier lieu des actions sur les énergies (substitutions de carburants, intégration des systèmes énergétiques, énergies renouvelables).

Le graphique suivant montre avec l’exemple d’une ville de 20 000 habitants que les efforts portant sur l’efficience de la demande ont beaucoup plus d’impact (un potentiel de réduction de l’ordre de 45 % pour l’efficience des bâtiments et de 50% pour la compacité de la forme urbaine) que les optimisations séparées des différentes offres (un potentiel de réduction de seulement 20% pour l’optimisation de l’offre énergétique). L’intégration de ces trois stratégies permet une diminution globale de l’ordre de 80%.

Baisse des consommations d’énergie pour 3 stratégies différentes : optimisation de l’offre énergétique, rénovation du parc immobilier ou modèle de ville plus compacte

Le déploiement des énergies renouvelables  et des technologies suppose préalablement une réduction massive de la demande

L’écart actuel entre demande énergétique urbaine et potentiel de production locale d’énergies renouvelables est très important. La densité de la demande d’énergie dans les zones urbaines est généralement comprise entre 10 W/m2 et 100 W/m2. Elle peut atteindre 1 000 W/m2 dans les zones de gratte-ciel ou les quartiers d’affaires. À l’opposé, les énergies renouvelables ont des densités d’offre énergétique typiques de quelques W/m² dans des conditions idéales.  Avec les niveaux actuels de consommation énergétique dans les villes, même en recouvrant les villes de dispositifs d’énergies renouvelables, seuls 1 à 5% de la demande serait couverte. Le déploiement des énergies renouvelables produites localement est un des piliers de la transition énergétique (Proposition 8.1). Cependant, pour que ce déploiement soit pertinent et couvre une part significative des consommations énergétiques, l’intensité énergétique des territoires doit nécessairement être significativement diminuée au préalable.

Les leviers pour diminuer la demande énergétique dans les territoires

Une organisation spatiale plus raisonnée pour améliorer l’efficience structurelle des territoires

Les territoires urbains français partagent quatre tendances majeures de l’urbanisation mondiale : l’expansion spatiale et la fragmentation, la diminution des densités démographiques, la diminution des densités construites, l’émergence de grandes zones métropolitaines. L’effet cumulé et non intégré de la planification foncière et du développement des infrastructures a conduit à des formes étalées et fragmentées fortement consommatrices d’énergie et de territoires. L’étalement urbain des dernières décennies a provoqué un chemin de dépendance au transport automobile et a augmenté le coût des infrastructures.

Il existe une corrélation forte entre densité urbaine et consommation énergétique par habitant pour les transports. De faibles densités d’emplois, de commerces et de logements accroissent les distances moyennes de déplacement pour les trajets relatifs au travail, aux achats et aux loisirs. Plus que la densité moyenne, les facteurs qui influencent le plus la croissance de la consommation énergétique de transport sont l’homogénéité dans la distribution de la densité (évaluée par des mesures d’entropie) qui accroît la consommation, et l’articulation davantage polycentrique de la densité (évaluée par des mesures de coefficient de hiérarchie spatiale) qui diminue la consommation. Pour la transition énergétique, les pouvoirs publics doivent initier et encourager des concentrations et des densités plus fortes au sein des territoires (Propositions 1.3), prioritairement autour des nœuds de transport en commun existants (Proposition 1.4), en encourageant les initiatives individuelles de densification locale (Proposition 12.1).

Des seuils de taille et de densité minimale sont importants pour les infrastructures urbaines spécialisées : les réseaux de transport en commun, les systèmes énergétiques (chauffage et refroidissement urbain, co-génération, smart grids) ne sont, en règle générale, pas viables économiquement en dessous d’un seuil de densité brute 5000 habitants/km2. Ce seuil de densité est également déterminant pour la viabilité économique des commerces de proximité. Enfin, les coûts d’infrastructure par habitant pour la collectivité sont jusqu’à 4 fois plus élevés dans les zones à faible densité. La redensification et la réintensification des territoires sont donc une priorité pour la transition énergétique (Propositions 1.2, 12.1, 13.3 et 13.4).

 Une forme urbaine à l’échelle des quartiers qui privilégie l’accessibilité

La structure spatiale locale des territoires est déterminée par l’interaction des usages du foncier, des réseaux et des systèmes de transport. A l’échelle des quartiers, trois caractéristiques de la forme urbaine sont des leviers clé pour la diminution de la demande énergétique : la mixité, la maille fine des réseaux viaires, et la proximité des aménités urbaines.

La mixité dans les usages du foncier est une condition nécessaire pour le regroupement à l’échelle locale des activités économiques dans des environnements compacts. La mixité fonctionnelle promeut les trajets courts et les modes de déplacement doux, contrairement aux environnements urbains zonés et mono-fonctionnels qui sont dépendants à l’automobile (Proposition 2.1). La mixité fonctionnelle contribue à augmenter la mixité des usages énergétiques. En effet, les courbes de charge (électricité, chaleur ou froid) diffèrent selon la fonction des bâtiments (logements, bureaux, commerces). La mixité fonctionnelle permet donc de lisser les pics de consommation locale (Proposition 2.2) et permet le déploiement des stratégies synergétiques (Propositions 7.2 et 7.3). Enfin, la mixité à l’échelle du quartier favorise l’inclusion sociale dans les territoires.

La « maille » des réseaux viaires est caractérisée notamment par la densité linéaire de rues (en km/km²) et la densité d’intersection par km². Un tissu urbain à maille fine et caractérisé par de petits îlots présente une connectivité beaucoup plus élevée qu’un réseau urbain moderniste composé de super blocs. Les villes qui ont un tissu urbain à maille fine encouragent la marche: les distances à parcourir sont plus courtes et le système de petits îlots permet au piéton de changer de direction facilement. À cela s’ajoutent la qualité et la diversité des espaces publics permise dans les tissus urbains à maille fine. L’accroissement de la connectivité de la maille viaire est essentiel pour accélérer la transition vers des modes de transport plus doux (Proposition 4.2). Il doit être renforcé par la diversification de l’offre de transports en commun par la multiplication des nœuds et des interconnexions (Proposition 4.3).

L’accessibilité est un support d’efficience énergétique et un vecteur de croissance économique. L’accessibilité est un indicateur du coût (temporel et financier) pour accéder aux ressources et aux opportunités économiques et sociales (activités de production et de consommation) dans les villes. L’accessibilité et les trajets courts doivent être privilégiés à la vitesse, notamment au travers de l’intensité et de la mixité des territoires (Proposition 4.1). La distribution spatiale et la taille des aménités et des services urbains est déterminante pour garantir l’accessibilité. Une distribution avec une « longue traîne » de petits éléments et non uniquement des grands éléments augmente l’accessibilité (Proposition 1.5). C’est le cas par exemple à Paris ou Manhattan où la longue traine de petits jardins publics assure pour tous les habitants une proximité des espaces verts à moins de 300m, avec une surface totale d’espace verts limitée.

 Améliorer l’environnement construit

Agir sur la qualité de l’environnement construit permet de diminuer les consommations énergétiques de 40%. Les deux principaux leviers qui permettent de diminuer la demande énergétique des bâtiments sont (1) l’optimisation de la forme des bâtiments et (2) l’amélioration des performances thermiques des bâtiments. Ces deux leviers sont complémentaires et doivent être actionnés simultanément. Il est très coûteux de rattraper une mauvaise conception initiale des formes par des dispositifs technologiques. De plus, l’efficience énergétique obtenue par une meilleure performance thermique des bâtiments risque d’être annulée par l’effet de rebond lié à un transfert vers des formes de développement urbain moins compactes (maisons individuelles par exemple).

L’optimisation des formes permet de diviser par deux les besoins de chauffage, de rafraichissement, d’éclairage et de ventilation. L’optimisation des formes construites repose principalement sur un arbitrage entre la compacité des bâtiments et le taux de volume passif. Dans les formes urbaines compactes, les bâtiments présentent relativement moins de surfaces de murs externes par m2 de plancher, ce qui réduit les pertes radiatives, et donc les besoins de chauffage. Un taux de volume passif élevé garantit que la majeure partie de la surface de plancher est située à moins de 6 m de l’enveloppe extérieure : les apports solaires naturels, l’éclairage et la ventilation passive permettent alors de diminuer la consommation énergétique du bâtiment (Proposition 3.1).

Le deuxième levier d’action pour diminuer les consommations énergétiques de l’environnement construit repose sur l’amélioration de la performance thermique, et notamment la rénovation énergétique (Proposition 3.2). Les normes et réglementations thermiques se sont montrées très efficaces pour la construction neuve et devront être généralisées (Proposition 3.3). Leur impact global est moindre pour le parc existant, du fait du faible taux de renouvellement du parc (de l’ordre de 1% par an). Le renforcement de la dynamique requiert donc un renforcement des incitations fiscales pour la rénovation thermique du parc existant (Proposition 12.2).

Accélérer la transition des modes de transport

A court terme, l’efficacité énergétique globale du secteur des transports peut être améliorée par l’introduction de carburants alternatifs à faibles émissions de carbone et par celle de l’électricité (Propositions 5.2 et 8.2). A moyen et long terme, l’accélération de la transition vers des modes de transport plus durables repose sur deux piliers : (1) des mesures restrictives qui limitent la mobilité individuelle motorisée et (2) des politiques proactives qui améliorent l’attractivité des déplacements non motorisés et encouragent le choix des transports en commun. L’objectif est de transformer la dépendance à l’automobile en un cercle vertueux de choix des modes non- motorisés et du transport public.

Une mesure restrictive clé est l’internalisation progressive des externalités du transport privé motorisé à son coût. Si les coûts externes étaient pleinement internalisés, ils pourraient doubler les coûts de transport motorisé privé. La tarification de la circulation et des frais de congestion permettent de modifier le comportement de transport urbain. Une telle politique nécessite la mise en œuvre de mesures individuelles, comme par exemple la limitation des vitesses (généralisation des zones 30) ou les systèmes de tarification de la circulation (pour les routes et parkings, etc.) (Proposition 4.5)

Cette approche doit être complétée par une transition vers des réseaux de transports en commun denses, interconnectés et avec une fréquence de service élevée (Proposition 4.3). L’objectif de la planification urbaine durable est de constituer des agglomérations urbaines compactes où tous les habitants sont à moins de cinq minutes de marche (<500 m) d’un service de transport public efficace (Proposition 4.1). La forme des réseaux de rues et l’aménagement urbain peuvent également  faciliter la marche et le vélo, et leur intégration dans un réseau de transport public efficient (Proposition 4.2).

Déployer le smart et les synergies

D’importantes économies d’énergie sont possibles en augmentant les synergies entre les usages. Les smart grids consistent à mettre en synergie et à gérer de façon intelligente la production et la demande d’électricité au cours du temps. Le déploiement des stratégies de type smart grid à l’échelle urbaine est susceptible de contribuer de façon significative à la baisse des consommations électriques et des émissions de gaz à effet de serre (Proposition 6.3). Il repose notamment sur la généralisation des compteurs électriques intelligents pour collecter en temps réel l’information sur la demande énergétique (Proposition 6.1) et des mécanismes d’effacement diffus pour lisser les pics de consommation (Proposition 6.2).

La diversité de la gamme énergétique urbaine depuis les procédés industriels de haute température jusqu’à la basse température de chauffage des logements permet la maximisation de l’efficience énergétique grâce à des échanges de flux d’énergie, que ce soit par des systèmes de cogénération classiques ou par des procédés plus complexes d’utilisation de la chaleur « en cascade ». Les stratégies de type smart grid peuvent être étendues à tous les flux énergétiques urbains et à toutes les entités urbaines présentant un déficit ou un surplus de chaleur, d’eau chaude domestique, d’eau grise ou de courant continu (production d’énergie renouvelable) (Proposition 7.2).

 

Les leviers pour agir sur l’offre énergétique

Décarboner les territoires en déployant les énergies renouvelables locales et les carburants alternatifs

La transition énergétique dans les territoires doit être enclenchée en premier lieu avec des stratégies visant à réduire la demande énergétique. Pour amplifier cette dynamique, une transition à grande échelle vers des sources d’énergie renouvelable est nécessaire et possible en utilisant un mix énergétique comprenant l’énergie éolienne, marémotrice, solaire, la biomasse, les sources géothermiques et hydroélectriques. Le déploiement des énergies renouvelables doit être soutenu directement par les différents échelons de gouvernance, et notamment les échelons locaux. Les systèmes de production d’énergie à partie des déchets, les systèmes de chauffage et de refroidissement urbain, la mise en œuvre de tarifs de rachat pour l’électricité renouvelable, les subventions, les prêts à faible intérêt et des subventions pour l’installation d’énergie solaire et éolienne (parmi d’autres sources d’énergie renouvelable), et les budgets de R&D alloués à des sources d’énergie neutres en carbone font partie du portefeuille d’actions pour les municipalités qui cherchent à réduire les consommations d’énergie et les émissions de GES (Propositions 8.1 et 10.3). Cette dynamique devra être accompagnée, notamment pour les transports, d’un soutien direct aux carburants alternatifs à faibles émissions de carbone et à l’électricité (Proposition 8.2).

Augmenter la flexibilité de l’offre en fonction de la demande au travers du smart et du stockage

La transition énergétique dans les territoires modifiera les conditions dans lesquelles l’énergie est produite, stockée, transportée et consommée. Passer d’un système centralisé basé principalement sur une offre d’énergie fossile et une forte demande vers un système énergétique décentralisé, sobre et propre est la seule option possible pour réussir la transition énergétique. Cette réussite dépendra de la capacité à mettre en œuvre des solutions au niveau des collectivités locales. Les technologies de type « smart cities », avec un suivi en temps réel des consommations énergétiques, permettront d’augmenter la flexibilité de l’offre en fonction de la demande (Propositions 6.1, 6.3 et 9.1). La nature intermittente des énergies renouvelables requiert un développement ambitieux des capacités de stockage de l’énergie sous ses différentes formes (électricité, chaleur, etc.) à l’échelle des collectivités locales (Proposition 9.2). L’augmentation des capacités de stockage local de l’énergie permettra en outre de développer les capacités d’effacement diffus (Proposition 6.2) et d’optimiser ainsi la gestion des pointes de consommation électrique qui ont des conséquences importantes en termes d’émissions de carbone, en termes financiers et en termes de risques pour les réseaux de distribution, notamment en hiver.

La gouvernance et le financement de la transition énergétique dans les territoires

Une stratégie globale et intégrée

Seule une approche intégrée des territoires permet de créer des synergies et de dépasser le fractionnement de l’action publique et des thématiques d’efficience organisées selon des approches sectorielles et verticales, peu ou pas structurées de manière complémentaire. Une gouvernance intégrée de la transition énergétique dans les territoires doit primer sur une multiplication d’actions sectorielles isolées. La gouvernance institutionnelle requise pour mettre en œuvre l’efficience énergétique à l’échelle urbaine repose sur une intégration des compétences en planification spatiale, en gestion du foncier et en planification des transports et de l’énergie (Proposition 11.2).

Rôle des investissements structurants

De par son double rôle de conseil et d’ensemblier, le groupe Caisse des Dépôts dispose de leviers puissants pour articuler planification spatiale des territoires et planification énergétique. Les investissements dans le domaine des transports, de l’énergie et des communications sont structurants pour les territoires : ils sont des vecteurs d’efficience et de productivité des ressources. Le rôle majeur du groupe Caisse des Dépôts en tant qu’investisseur dans les territoires doit contribuer, au travers de la commande publique, à la fertilisation d’un environnement qui soutient la création de valeur sur le long terme. Pour atteindre les objectifs de création de valeur sur le long terme, les investissements structurants doivent s’accompagner de stratégies politiques et réglementaires locales ambitieuses pour contrôler notamment l’expansion spatiale induite. Le rôle du groupe Caisse des Dépôts en termes de conseil amont pour l’accompagnement des collectivités locales dans la définition de ces stratégies est essentiel (Proposition 11.1).

Financer la transition énergétique avec mécanismes innovants

Le rôle des entreprises privées dans le financement et le fonctionnement des systèmes énergétiques urbains augmente, et ouvre de nouvelles perspectives de financement pour la transition énergétique. Alors que les systèmes énergétiques urbains précédents ont souvent été financés par projets en couvrant l’endettement par les revenus générés par le système, les entreprises de services énergétiques recourent de manière croissante au financement sur l’ensemble de leur bilan pour financer ces systèmes. La transition énergétique repose sur une synergie forte entre acteurs publics et entreprises privées (Proposition 13.3), qui contribuera par ailleurs à redynamiser l’emploi localement.

Les mécanismes de taxation locale offrent des opportunités nouvelles pour financer la transition énergétique, tout en créant des incitations pour les comportements plus vertueux. C’est le cas par exemple du versement pour sous-densité qui consiste à taxer les projets urbains en dessous d’un seuil de densité construite fixé localement (Proposition 13.4). Les taxes locales offrent également des opportunités pour le financement de la transition énergétique lorsque celle-ci, à travers des politiques de densification et d’accroissement de la mixité, s’accompagne d’une forte hausse de valeur foncière. Les autorités locales, en partenariat avec des entreprises privées, peuvent utiliser les mécanismes innovants de capture de valeur et gager leurs emprunts sur leurs futures recettes fiscales, comme le font en particulier les municipalités de Tokyo et de Hong Kong pour financer les systèmes de transport en commun avec un coût nul pour la collectivité. Ces mécanismes permettent de capter une partie de la valeur générée par les investissements des collectivités locales et de la réinvestir dans les projets futurs. Les mécanismes utilisés pour capturer la valeur créée par l’investissement public dans les transports pourraient également être appliqués aux investissements publics dans la planification énergétique (Proposition 13.2).